A travers l’histoire de la forteresse médiévale
Au sommet inaccessible de toutes parts (750m), excepté au sud, du côté du village d’Arquizat, se dressent les ruines imposantes du château médiéval qui veillait sur la vallée de Vicdessos et défendait l’accès à la vallée de Miglos. Au nord, la départementale D156 a remplacé le chemin reliant Niaux à Arquizat,
Placé à un point stratégique de la vallée du Vicdessos, ce fort défendait, au moyen-âge, outre l’accès au territoire de Miglos, une grande partie de la contrée.
La première mention du Château en 1159, Pierre de Miglos rend hommage au comte de Foix.
En 1213 …castra de …, de Mereglos… (1) (Concile de Lavaur) le comte de Foix Raymond Roger de Foix remet toutes ses terres en garantie à Pierre le Catholique (Pierre II) roi d’Aragon avant la bataille de Muret. Le château de Miglos fait partie des places-fortes données en garanti à l’église de Rome qui se prépare à anéantir les cathares. Cet acte reprend 12 châteaux et 6 « caougnos » (2).
Il est également nommé dans l’enquête sur la délimitation du comté de Foix, réalisée en 1272 : ” … item vallis de Miglos cum castro de Miglos et sua dominatione…” (3).
Le château de Miglos devait s’intégrer à un dispositif important de défense de cette zone du Haut Comté de Foix. Il était en liaison, par signaux, avec le château de Montréal de Sos (Olbier). Côté Tarascon, il communiquait avec les châteaux de Quié et Génat, par l’intermédiaire du fort de Castel Merle, qui était situé sur le haut du chaînon calcaire qui sépare Niaux de Baychon. Castel Merle a complètement disparu. Quelques vestiges subsistaient encore au début de ce siècle. Sur une falaise de cette même barrière rocheuse, on peut encore voir la “Caougno paredado” (la grotte fortifiée de Baychon) dont la construction remonte également à une époque très ancienne, et qui pouvait, tout comme Castel Merle, appartenir au système défensif du château de Miglos.
Par ailleurs, la dispersion de l’habitat de ce territoire (cinq hameaux) semble également ancrée dans un passé fort éloigné. Ainsi, dans les interrogatoires de l’inquisiteur Jacques Fournier (futur pape Benoît XII), menés de 1318 à 1325, on relève les noms de Norgeat, Norrat et Axiat (Arquizat étant assimilé à Miglos) associés aux pérégrinations des “bonshommes” cathares se rendant à Larnat et qui comptaient des sympathisants actifs à Norrat et Axiat, plus particulièrement.
Ne refermons pas cette parenthèse, sur l’époque Cathare, avant de signaler que le plus illustre des habitants de la vallée, Arnaud de Miglos (4), seigneur du lieu, a été convaincu d’hérésie (tout comme sa fille Brunissende) (5) après la chute de Montségur. Dans sa confession aux Inquisiteurs, le 24 mai 1244 (6) (confirmée le 12 mars 1247) il déclare, entre autres, avoir cru en la parole des “Parfaits”, dont certains étaient venus dans son château de Miglos, où il les avait “adorés”. Également, il dit avoir fait parvenir à Pierre Roger de Mirepoix, qui défendait Montségur assiégé, douze cordes pour une pierrière, deux frondes pour une baliste et une arbalète. Tout ceci lui a valu d’être enfermé dans les cachots (“le mur”) de la cité de Carcassonne. Il sera rendu à la liberté, sur ordre donné par le pape Innocent IV le 24 décembre 1248.
Au tout début du XIVème siècle, la famille De Miglos possédait le fief du même nom, qu’elle tenait du comte de Foix depuis 150 ans environ. A noter que le premier porteur de ce patronyme semble avoir été Brunet. Il était très certainement fils de Wilhem Aton, qui, vers 1108, restitue au chapitre de St Sernin de Toulouse tous ses droits sur l’église de Miglos, qu’il avait usurpés.
Pour un motif ignoré (peut-être son appartenance à l’Hérésie cathare, qui avait réapparu avec vigueur dans nos contrées, après 1300) la famille De Miglos va être dépossédée de sa seigneurie, au profit de celle de Son (ou d’Usson). La donation de la vallée et du château de Miglos, faite à Bernard de Son par le Comte de Foix Gaston 1er, est scellée par acte du 21 février 1311.
Après cette date, les De Miglos conserveront néanmoins quelques biens sur leur ancien fief. Par la suite, on retrouvera cette illustre famille à la tête des seigneuries de Junac, Luzenac et Château-Verdun. Bernard de Son restaurera le château de Miglos en 1320. Un important litige l’opposera d’ailleurs à 26 habitants de la vallée, qui refusaient d’effectuer les corvées nécessaires à une telle entreprise.
En 1331, Jean de Son succèdera à son père, Bernard. Puis, la terre de Miglos changera plusieurs fois de mains, au cours des siècles. Elle appartiendra successivement aux familles de Rabat (Jourdain, 1343), d’Arnave (Guilhem-Bernard, 1380), du Léon (Guilhem-Arnaud, vers 1400), de Louvie (Manaud, vers 1450), de Béon (Pierre, 1510), de Goth (Bernard, 1575), de Montaut (François, 1610 ; fondateur de la branche De Montaut-Miglos).
Arrive 1789. Jean-Louis de Montaut est alors baron de Miglos. Et l’on reparle du château féodal, qui aurait été brûlé (vraisemblablement fin août 1792) à la suite des divers événements engendrés par la Révolution. Geste symbolique en fait : la bâtisse tombe en ruines et la famille du seigneur est installée, depuis de très nombreuses années, dans une vaste demeure sise à l’entrée du village d’Arquizat (en venant de Capoulet) également appelée “le Castèlh” et transformée en ferme, par la suite.
Les «révolutionnaires» n’ont pas eu l’intention de réellement nuire à la famille de Montaut, sans quoi ils auraient pris pour cible la demeure seigneuriale, mais plutôt de détruire ce qui représentait sans doute, à leurs yeux, la puissance seigneuriale (7).
Après bien des péripéties, la SAFER rachète le château en 1976. Il deviendra propriété du département de l’Ariège en 1984. Le château féodal et ses vestiges ont été classés aux Monuments Historiques, en date du 22 septembre 1987, “considérant que la conservation des ruines du château d’Arquizat à Miglos (Ariège) présente au point de vue de l’histoire et de l’art un intérêt public en raison de leur importance historique et de leur disposition architecturale”.
La même année 1987, création de l’AACM Association des Amis du Château de Miglos.
(1) Catel G. Histoire des comtes de Toulouse, Toulouse, 1623, p. 276.
(2) Castillon d’Aspet Histoire du Comté de Foix Garnier 1852 tome I, p446 – Lafuente Stéphane Miglos p84 Lacour 2001
(3) Bibliothèque Nationale.., Manuscrit latin. 9187, f°72 Devic, Vaissette, Histoire générale du Languedoc, Toulouse, 1872, tome X, acte 5, col.91.
(4) Copie, Fonds Doat, Bibliothèque Nationale, 24, f° 246v – 248v Duvernoy, Bernard de Caux, pp. 26 – 31.
(5) Copie, Fonds Doat, Bibliothèque Nationale, 24, f° 264r -265v Duvernoy, Bernard de Caux, pp. 54 – 57].
(6) Copie, Fonds Doat, Bibliothèque Nationale, 24, f° 293r – 196v.
(7) Lafuente Stéphane -p201- Miglos, une Baronnie du haut-Comté de Foix sous l’ancien régime (1599-1789).